Achille
Achille est sans doute le plus grand des héros grecs. Il est le fils d’une Néréide (divinité marine), Thétis, que les dieux ont forcé à épouser un mortel, Pélée, roi de Phthie, en Thessalie. Il est appelé par Homère « le Péléide » ou « l’Éacide » « aux pieds légers » ou « aux pieds rapides ».
Pour le rendre invulnérable, sa mère l’a plongé dans le Styx en le maintenant par le talon, qui deviendra son seul point sensible. Cependant, cette tradition n’apparaît pas dans l’Iliade : Achille ne semble pas insensible aux coups. Il apprend l’art de l’éloquence et le maniement des armes avec Phénix. Sa mère lui laisse le choix entre une vie longue et paisible, mais obscure, ou une vie courte et glorieuse, Achille choisit la gloire. Le devin Calchas ayant prédit qu’il était indispensable à la victoire des Achéens sur les Troyens, Thétis tente de le soustraire au combat en l’envoyant se cacher parmi les filles de Lycomède, roi de Scyros. Ulysse ira l’y chercher et le découvrira par ruse. Mais d’après Homère, c’est Pélée qui envoie Achille à la tête des Myrmidons rejoindre Agamemnon, accompagné de Phénix et de son inséparable ami Patrocle.
Achille combat durant neuf ans avec les Achéens, réduisant des cités alliées de Troie. La dixième année (sujet de l’Iliade), il s’oppose à Agamemnon, qui l’humilie en lui prenant sa captive bien-aimée Briséis, et se retire du combat avec ses Myrmidons et Patrocle, son ami favori. La rancune d’Achille va être tenace et résister à l’ambassade d’Ajax et d’Ulysse, envoyés par Agamemnon avec la promesse de riches présents, sept femmes, l’une de ses filles, Briséis… Achille rejette l’ensemble : « Agamemnon ne saurait convaincre mon cœur, avant d’avoir d’abord entièrement payé l’affront dont souffre mon âme » (Iliade, IX, 386-387). Dans cet épisode, le héros apparaît sous un aspect plus tendre : Ajax et Ulysse le trouvent jouant tranquillement de la cithare ( « son cœur se plaît à en toucher, tandis qu’il chante les exploits des héros » ) en compagnie de Patrocle et, dans sa longue réponse, au cours de laquelle il évoque les deux destins prédits par sa mère, il semble choisir une longue vie sans gloire, puisqu’il déclare repartir le lendemain pour Phthie avec ses hommes, et conseille aux guerriers d’en faire autant. Cependant, devant la déroute des Achéens et le début d’incendie de leurs nefs, il consent à envoyer Patrocle avec ses propres armes et ses Myrmidons pour repousser les Troyens hors des camps achéens, mais lui interdit de les poursuivre jusqu’aux murs de la ville, se réservant la gloire de terminer le massacre. Patrocle ne suit pas cet ordre et il est tué par Hector. Achille, fou de douleur et de rage, revêt de nouvelles armes forgées par Héphaïstos, et se lance dans la bataille pour venger « celui de mes amis que je prisais le plus, mon autre moi-même » (Iliade, XVIII, 81).
Il tue Hector en combat singulier. Il donne des funérailles solennelles à Patrocle (chant XXIII), au cours desquelles ont lieu des sacrifices humains ( « douze nobles fils des Troyens magnanimes » ) et des jeux funéraires. Toujours plein de haine, Achille outrage le corps d’Hector en le traînant derrière son char autour de la tombe de Patrocle. Il accepte cependant de rendre la dépouille d’Hector à son père, le vieux Priam, venu jusqu’aux nefs achéennes le supplier d’accepter une énorme rançon contre son fils, et il lui accorde une trêve de onze jours pour célébrer les funérailles (chant XXIV).
La mort d’Hector annonce celle d’Achille. Le fils de Pélée ne connaîtra pas la victoire des Achéens. Après un combat avec Penthésilée, la reine des Amazones venue au secours des Troyens, qu’il tue en tombant amoureux d’elle, il est tué à son tour par une flèche de Pâris, guidée par Apollon, qui lui transperce le talon… Ses cendres seront mêlées à celles de Patrocle, selon le vœu de son ami, et l’on placera à côté celles d’Antiloque (son deuxième ami, un des fils de Nestor, qui lui avait apporté l’annonce de la mort de Patrocle). Ses funérailles sont racontées au début du chant XXIV de l’Odyssée, par l’âme d’Agamemnon. Au chant XI, Ulysse descendu aux Enfers recueille les regrets d’Achille : « Ne cherche pas à m’adoucir la mort, ô noble Ulysse ! /J’aimerais mieux être sur terre domestique d’un paysan,/fût-il sans patrimoine et presque sans ressources,/que de régner ici parmi ces ombres consumées… » (v. 488-491).